Déchets radioactifs : quels enjeux ?
Éthique ● Philosophie du risque ● Énergie nucléaire
#héritage transgénérationnelle #anthropocène #politique publique
Poster
Hippolyte Lesseliers
Étudiant en master Communication visuelle et graphique
@los_hippos
Céline Kermisch
Ingénieure civile, docteure en philosophie, professeure d’éthique
Organisme national des déchets radioactifs et des matières fissiles enrichies (ONDRAF) École polytechnique, ULB


« C’était super enrichissant de me confronter à un sujet plus technique que d’habitude, ça m’a fait du bien de sortir de ma zone de confort. »
Éthique des sciences et techniques, le cas de la gestions des déchets radioactifs : philosophie, perception et gestion des risques
La production d’énergie nucléaire, mais aussi la production de radioisotopes à usage médical et d’autres activités industrielles produisent des déchets dits « radioactifs ». Ces déchets se caractérisent par une toxicité décroissante dans le temps. Ils peuvent être catégorisés en fonction de deux caractéristiques : leur activité (sont-ils peu ou très toxiques ?) et leur durée de vie (sont-il toxiques longtemps ou non ?).
Les déchets de faible et moyenne activité et de courte durée de vie – les déchets de catégorie A – ne posent pas de problème majeur dans la mesure où ils doivent être isolés de l’Homme et de l’environnement pour une période relativement courte – 300 ans. Dès lors, ces déchets seront stockés dans des installations de surface, qui resteront sous le contrôle de l’Homme durant toute cette période – on parle ici de sûreté « active » car elle repose sur l’intervention de l’Homme. Notons que la notion de sûreté, dans le domaine nucléaire, renvoie à la protection contre les dommages non-intentionnels – les accidents – alors que la sécurité renvoie à la protection contre les dommages intentionnels – les actes de terrorisme par exemple.
En revanche, les déchets de haute activité et/ou de longues durée de vie – les déchets de catégorie B&C – posent des enjeux éthiques nouveaux au vu des échelles de temps qu’ils engagent. En effet, pour protéger l’Homme et l’environnement, ces déchets doivent être isolés pour une durée de plusieurs centaines de milliers d’années – une durée inédite pour un projet, qu’il soit sociétal ou industriel.
La solution de référence au niveau international pour les déchets de catégorie B&C est le stockage géologique à plusieurs centaines de mètres de profondeur. Ce système repose sur une double barrière : d’une part une barrière ouvragée – les galeries, les containers, etc. – et d’autre part une barrière naturelle – la roche hôte, une couche géologique stable. Cette double barrière a pour objectif d’assurer une sûreté à long terme sans que l’intervention de l’Homme ne soit nécessaire. On parle ici de sûreté « passive ». Ce stockage a pour vocation d’être scellé à un moment donné, de manière à assurer l’isolation et le confinement des déchets à long terme. Néanmoins, en Belgique, il est prévu de privilégier la récupérabilité des déchets et donc de maintenir le stockage non scellé durant une période encore à définir.
Outre les enjeux techniques et scientifiques, le stockage géologique soulève également de nombreuses questions éthiques : quand doit-on prendre une décision quant à la gestion de ces déchets ? Qui doit financer leur prise en charge ? Comment assurer le consentement des communes qui accueilleront le stockage ? Comment peut-on les compenser ?
Comment assurer un processus décisionnel démocratique ? Doit-on préserver l’autonomie des générations futures ? Comment prendre en compte les incertitudes sur le long terme ? Faut-il retraiter les déchets ? etc.